vendredi 6 mars 2009

bortsch pour Eugène O.

Je vous écris - quoi d'autre à dire ?
J'ai tout dit si je vous écris.
Je sais, cela peut vous suffire
Pour me punir par le mépris.
Mais dans ma peine, mon martyre,
Vous qui gardez un coeur qui bat,
Vous ne vous détournerez pas.


(...)




Tania gémit, Tania soupire ;
La lettre tremble dans sa main,
Le ruban rose de la cire
Figé sur sa langue carmin.
Elle a penché sa douce tête
Sur le côté. Sa chemisette
Glisse le long d'un bras charmant.


(...)




Tania espère, impatiente,
Que cessent les frissons du coeur,
Le tremblement dans la poitrine -
Pourtant ses joues sont purpurines,
Le feu brûle toujours plus fort,
Il se répand dans tout le corps...
Ainsi s'agite dans la fièvre
Un papillon batifolant
Pris au filet d'un garnement ;
Ainsi frissonne un pauvre lièvre
Qui dans la plaine labourée
Voit le chasseur qui va tirer.

Et puis, elle soupire, et lasse,
Elle se lève de son banc
Et tourne dans l'allée, quand, face
A elle, juste droit devant,
Seul, - Evguéni ; ses yeux de flammes,
Terribles, qui lui transpercent l'âme ;
Comme un feu qui la frôlerait,
Et la voilà, elle, en arrêt.
Mais pour narrer les conséquences,
Ami lecteur, pour le moment,
Je suis trop fatigué, vraiment.
Laissez-moi prendre une distance,
Me reposer d'un long discours -
J'achèverai un autre jour.

* * * * * * *

Bortsch
(pour seize acteurs et une quarantaine de leurs spectateurs) :



- 3 kg d'épaule de boeuf ou autre morceau pour bouilli
- 600 g de poitrine de porc fumée
- 1kg de pommes de terre
- 1 kg de carottes
- 2 kg de céleri pomme
- 3 kg de chou blanc
- 3 kg de betterave rouge (cuite)
- 6 poireaux
- 6 gros oignons
- 3 bouquets de persil
- 3 bouquets d'aneth
- 8 pots de crème acidulée
- 5 cc de grains de poivre noir
- 6 feuilles de laurier
- 9 cs de vinaigre de vin rouge
- du sel
- ainsi que des litres d'eau... et une très grande casserole


Mettez les viandes au fonds de la casserole. Couvrez d'eau froide. Portez à ébullition et laissez cuire à gros bouillons. Au cours des trente premières minutes (dès l'ébullition), écumez régulièrement. Assaisonnez avec les feuilles de laurier et les grains de poivre.

Coupez tous les légumes en julienne. Lavez et épluchez-les avant, quand nécessaire, faut-il le préciser ?

L'usage d'un robot ménager est vivement conseillé, quitte à devoir demander au gentil mari d'une collègue de faire un détour pour venir vous le prêter.



Réservez un bon tiers de la betterave en julienne, et mélangez la avec le vinaigre de vin. Gardez-la à part.

Ajoutez le reste des légumes au bouillon, et de l'eau en quantité suffisante pour recouvrir le tout.


Pour accélérer les choses, vous pouvez anticiper et la faire bouillir avant, pendant l'atelier découpage. Vous aurez peut-être besoin d'une deuxième casserole. Faites comme vous pouvez avec le matériel disponible, vous mélangerez le tout au fur et à mesure du service...

Laissez cuire au moins deux heures, à feu doux. Remuez de temps en temps. Salez, goûtez, re-salez. Vers la fin, ajoutez le persil haché.


Retirez la viande et le lard, et coupez-les en dés. Au vu de la quantité de légumes, plusieurs mains seront nécessaires pour aller à la pêche au bouilli.



Réintégrez les morceaux de viande dans la casserole, et juste avant de servir, ajoutez la betterave marinée au vinaigre. Une étape indispensable pour obtenir une belle assiette rose foncé, les betteraves qui auront cuit avec le reste ayant perdu leur couleur.


Proposez, au service de la crème fraîche acidulée et de l'aneth haché. Dégustez avec de la vodka jusqu'au bout de la nuit.



Alexandre Pouchkine : Eugène Onéguine - traduction André Markowicz - Babel

6 commentaires:

lmm a dit…

nham...nham....

Anonyme a dit…

Dans mon désert, dans mon silence, je n'aurais pas connu le bortsch, j'aurais été en souffrance (...)
J'accepte votre offrande. Je suis en larmes devant vous.
Rideau

Anonyme a dit…

Superbe, succulent. Tout dans votre blog contribue à attiser nos papilles. Merci pour cette délicate pause gourmande et savoureuse. Bonne journée.

Anonyme a dit…

Eugène O, c'est magnifique. Quelques larmes, au moins, Estèbe a raison.

Cuisine Framboise a dit…

Des coïncidences décidément. Ma Puce, encore, et le théâtre... La Cerisaie cette année.. Peut-être...J'espère pour elle. Un mois sans répétition...

叉燒包Peter a dit…
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